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Avec François Simon chez David Toutain

IMG_5914J’ai le souvenir d’être allée à El Bulli en 2001 et durant les 5 heures qu’a duré le repas, à aucun moment il n’a été question d’autre chose que ce qu’il y avait dans l’assiette. Il n’est pas si simple d’être simultanément sur deux registres qui s’entrechoquent : celui de la conversation et celui de la gastronomie. Il ne faudrait aller dans certains restaurants qu’avec des gens silencieux ou alors muets, juste pour profiter pleinement de la saveur des mets, et observer intensément la disposition, l’assiette, la décoration, les gens autour.  Rompue à l’exercice par la grâce conjuguée de l’habitude et de l’amitié, la question ne se pose pas avec François. Il ne se laisse jamais complètement distraire et garde toujours un œil sur l’assiette, et une oreille dans la conversation. Se faire un «gastro» avec lui est un moment créatif ancré, où l’ici et le maintenant sont pleinement célébrés.

François est critique gastronomique depuis 30 ans, il entretient ses attributs de légende : une attitude réservée, un anonymat contrôlé, une probité candide. Il vient de quitter le Figaro après 25 ans de bons et loyaux services pour donner à sa carrière, et c’est tout à son honneur, une orientation plus risquée, moins salarié protégé et tout aussi hédoniste, François a toujours aimé toute forme de mise en danger, il a l’air comme ça un peu apeuré mais je peux vous garantir qu’au bout du plongeoir il y va. Ses expériences de la nuit et ses audaces protéiformes le prouvent. Malheureusement même si ça me démange je ne les dévoilerai pas (un jour peut-être, si nous sommes fâchés, ce qui n’arrivera pas)

En fait les choses ne se passent pas exactement dans l’anonymat espéré. Au moment même de la réservation, à mon avis toute la brigade est déjà au courant. Et oui François, même si tu fais mine d’en changer je te rappelle que tu as le même pseudo de réservation depuis la nuit des temps, donc forcément les gens du métier et quelques poulettes éconduites ou déçues ont pû diffuser l’info…Si ton entrée dans le restaurant est discrète en apparence, ton 3 pièces à carreaux et ta lavalière à fibule le sont moins. Une sorte de tapis rouge virtuel se déroule alors et un aréopage de serveurs se placent en formation.

C’est un peu l’impression que j’ai eue hier au restaurant de David Toutain. Moi «Mais ils t’ont reconnu», tu me réponds en posant ton Nikon sur la table : «Non non pas du tout». «Mais enfin François c’est le chef en personne qui nous apporte les plats, et puis nous avons pris le menu à 42 euros et nous en sommes déjà à 18 assiettes (Là l’exagération fait partie de la posture narrative)!!»

Le déni s’est délité lentement mais peu importe, c’était juste extra : une déco scandinave claire et apaisante pour l’ambiance et des audaces contrôlées dans les accords de saveurs pour la cuisine. Je ne vous en dis surtout pas davantage. Mais quel moment radieux !

A défaut d’un ami critique gastronomique, un repas chez David Toutain est un voyage que je vous conseille vivement de faire avec un silencieux, un muet ou un amoureux. Tiens au hasard : vendredi

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Happy Quinqua, c'est moi !

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